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Du paternalisme au soin collectif

La plus grande responsabilité des entreprises aujourd’hui ? “Prendre soin de ses collaborateurs”.
C’est ce que nous ont répondu les Français que nous avons interrogés dans une enquête récente (Tarot Boulot, juin 2021*). Alors que les derniers mois nous ont parfois un peu écorchés, beaucoup isolés et énormément questionnés, les corps sociaux des entreprises appellent de leurs vœux de la sollicitude.
Et nous aurions pu, chefs d’entreprise et managers que nous sommes, avoir été tentés de verser dans le paternalisme pour prendre soin de nos équipes.

Paternalisme, subst. masc. : Attitude du chef d’entreprise qui, de sa seule initiative, octroie à son personnel des avantages sociaux. Comportement bienveillant et autoritaire du patron envers ses salariés. 

Le contexte a imposé, au contraire, quelques fondamentaux du Care, cette disposition morale qui consiste à se soucier d’autrui pour rendre capacitaires les hommes et les femmes au sein de nos organisations. 

“Il faut se soucier de rendre « capacitaires » les individus, c’est-à-dire de leur redonner aptitude et souveraineté dans ce qu’ils sont.”

Cynthia Fleury

Ainsi, il y a 18 mois, au sein des équipes dont le métier était télétravaillable, s’est opérée une véritable révolution managériale.

Alors que les collaborateurs étaient tous isolés dans leur foyer, loin du cœur névralgique du bureau, les managers ont dû opérer une réelle transformation culturelle : manager par la confiance a priori, par le sens et surtout par la considération. Résultat : un boulevard d’autonomie dans une culture latine plutôt encline au paternalisme et un vrai souci d’attention dans un contexte de crise.

Une culture du soin a de vertueux qu’elle engage et implique plus qu’elle n’est passive. Au contraire du paternalisme qui tend à infantiliser par la protection, prendre soin, “c’est permettre la future vie, individuelle et collective,” nous dit Cynthia Fleury*. 

Elle est donc aussi œuvre collective. Lorsque l’on a questionné les travailleurs français sur leur entreprise rêvée, l’un d’eux nous a d’ailleurs répondu : « Mon entreprise idéale ressemble à un village où chacun prend soin de tout le monde. » Quand il s’inscrit dans une culture partagée, le soin est l’ouvrage de tous et non l’apanage du chef. 

Une culture du soin en entreprise n’est donc en ce sens pas contradictoire avec les envies d’autonomie (c’est la condition de travail à laquelle les répondants de notre enquête tiennent le plus) et d’impact (qui est passé au deuxième rang des priorités au travail) des collaborateurs français.

À la fois écoute et action, une pratique du soin permet de créer les conditions de l’excellence collective.

Alors que les corps sociaux ont été, au cours des confinements successifs, disloqués, fragilisés, épuisés, les dirigeants et managers ont ainsi joué une partition majeure dans le maintien du moral et de l’engagement des troupes. 

🏡 En télétravail, il a fallu “mettre les bouchées doubles pour sanctuariser des moments de soudure et de commun alors que, dans l’entreprise, beaucoup se joue dans l’informel, dans les interstices entre deux réunions qui sont des terreaux de communication et d’innovation inattendues,” nous partageait David Djaiz. 

Un an et demi plus tard, alors que la crise n’est plus crise, que l’inédit est devenu courant, dirigeants et managers sont à nouveau mis en difficulté. 

Face à des travailleurs qui ont été en prise à de grandes introspections et des questionnements existentiels, qui ont revu à l’étude leurs priorités de vie et qu’un télétravail a éloigné affectivement de l’entreprise, il est parfois difficile de mobiliser derrière l’intérêt collectif. Déménagements et non retour au bureau, demandes d’aménagements horaires, projets estivaux de réorientation… Ces derniers mois ont facilité des changements de trajectoires individuelles, et en cascade des désalignements et de l’incompréhension. 

Alors, pour la rentrée, on prend le temps de se retrouver. Pour de vrai. 

On se replonge dans les fondamentaux du Care et on prend soin de redonner le goût des autres*, d’embarquer tout le monde dans la dynamique collective. 

🏢 Et pour cela, le bureau sera clé, car l’unité de temps, de lieu et d’action est essentielle à la praxis commune. Les collaborateurs évaluent d’ailleurs à 8,2/10 l’importance d’avoir des jours de présentiel en commun avec ses collègues, et ce d’autant plus que 67% des répondants considèrent que les relations au sein de leur entreprise se sont détériorées. 

Et vous, qu’est-ce que vous faites avec vos équipes pour la rentrée ?

* Références :

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